Vers l’autre bout du monde # 1

Ce nouveau récit qui sera celui d’un voyageur vers « l’autre bout du monde », titre inspiré de la chanson d’Emily Loiseau (ci-dessous) se veut initiatique, sans but ni destination définie, une exploration intérieure et extérieure ponctuée de chansons, de poésies, de photos, de dessins. Une vision positive d’un autre monde possible, une réaliste utopie. Croire à demain, à un avenir différent.

©Alan Mabden

« La nature est […] un instrument de musique dont les sons, de nouveau, sont les touches de plus hautes cordes en nous » (Novalis)

Vers l’autre bout du monde

Face à ce monde à la dérive, je me sens de plus en plus impuissant, tel un marin sur un voilier dont le safran a rompu au plus mauvais moment, juste avant une tempète annoncée mais plutôt que d’être las, je préfère être là, retrouver mes sens pour donner du sens à cette vie. La ville, si elle a ses bons côtés, use mon organisme en me faisant perdre des repères vitaux comme des heures de lever et de coucher solaires, seules vraiment compatibles avec mon horloge interne. Les écrans m’envahissent, générant une lumière d’un vif artificiel, troublant ce si précieux cycle circadien, rongeant mon sommeil et mes nerfs. En étant hyper connecté, je me suis plutôt déconnecté de ma nature profonde, celle que j’ai ponctuellement retrouvé lors de vraies et longues vacances loin de tout au contact des éléments naturels ou d’un stage de « renaissance » dans un milieu propice au ressourcement. j’y ai souvent rencontré des personnes ayant vécu une vie trépidante, un burn-out, une rupture affective ou une perte de travail, avec la même envie de changer de braquet, de paradigme, d’envisager le monde et la vie autrement. Pourtant toutes ces formidables personnes, généreuses et bienveillantes, retournaient vers la ville et son estomac carnassier, cette lumineuse tentatrice et ses promesses de bonheur matérialiste.

Peut-être que ce confort nous anesthésie, sorte de drogue pour calmer notre insécurité permanente. On regarde un film ou une série chaque soir, vit des aventures, des liaisons amoureuses projetées, des voyages à l’autre bout du monde par procuration, et et « revit » comme par magie, sans bouger de son fauteuil. De temps en temps, parce que cette vie là est trop morne, on se bourre la gueule, fume des pets, vocifère devant un match ou bien on refait le monde, on boit et on « tire » des coups… Sublime défouloir :)… Drogués au propre et au figuré, consumérisés, lobotomisés par des « dealers » industriels qui eux mêmes fuient à haute dose et grand luxe leur triste condition humaine « haut de gamme ». « Ceux là » qui nous font subir leurs guerres; économique, sociale, militaire, écologique, en créant des besoins artificiels pour assouvir leur soif intarissable d’argent, de paraître et de reconnaissance. Ainsi ils nous emprisonnent dans ce vieil imaginaire hollywoodien que nous copions par envie ou pour les mêmes raisons, loin des réalités d’un autre monde possible.

A force de me taper à l’avance la tête contre ce mur futur que je vois arriver droit devant, devant cette logique impitoyable qui me fait du mal, j’ai enfin décidé de réagir. Fini le temps des drapeaux et des incantations dans des manifestations qui finissent stériles, fini la lutte contre des sourds hommes de fer, fini les votes pour une illusoire « démocratie ». Se dire, enfin, que je ne peux rien pour « Le monde », en tout cas « ce monde la » qui court vers le naufrage assuré. Cela ne ne veut pas dire que je baisse les bras, simplement que je décide de ne plus me prendre la tête avec ces actus toujours moroses, reines du sabotage intérieur, génératrices d' »aquabonisme ». S’avouer simplement impuissant à vouloir régler les guerres, la violence, les injustices sociales et économiques, à vouloir « régler le dérèglement climatique » avec des paroles, des écrits ou sur un vlog. Couper le cordon médiatique. Ne plus être un avatar dans un jeu vidéo truqué, vouloir en sortir. Créer une véritable rupture mais il faut du courage pour ça, partir pour tenter autre chose, se mettre en marche, quitte à se mettre dans l’inconfort pendant quelque temps.

Vivre avec moins mais vivre avec plus de temps pour soi pour mieux rencontrer les autres. Accepter de vivre différement de ses parents ou grands parents, baignés dans un bain de surabondance. Se dire que leur route était une quatre voies ou l’on allait trop vite, sans voir le paysage, les petits villages, l’auberge du bord de route. Sortir au prochain péage, prendre la bretelle à gauche, direction la vraie montagne, la vraie mer, les vrais gens, pas celles des résidences secondaires à touristes mais suivre la route qui conduit loin des sentiers battus ou la neige existe encore, ou la côte sent bon le goémon, un monde qui ne flirte pas avec le béton, une nature et des âmes préservées loin de la dite « humanité ». Trouver un coin ou se construire un petit cocon à soi ou simplement passer sans laisser de trace, vivre d’autres cultures, d’autres habitudes.

Ce matin là, les yeux brillants vers l’espoir levant, les poumons et le moral en montgolfière, je pensais fort à cette frontière entre moi et moi, si simple à franchir. Juste un pas, un billet de transport. J’avais envie de rêver, d’être positif, de me dire que quoi qu’il arrive à « ce monde là », je serais capable de m’adapter et de trouver des équipiers de cordée, des marins de tempête, des compagnons et compagnes de cœur.

Je me tiens prêt à bouger, à quitter, pour faire face à toute situation. Surtout ne pas envisager le long terme, profiter du présent et vivre dans « l’autre monde », celui qui existe déjà par sa beauté et dès maintenant.

©Alan Mabden / Mercredi 15 Mars / Photo de couv Ben Mazué

2 commentaires

  1. Pas facile d’arrêter de penser, quand on a commencé, c’est fini on ne peut plus s’arrêter, l’addiction est là. Aller marcher, être dans la nature n’empêche pas de penser mais permet de mieux penser, je l’ai souvent observé. Les pensées sont plus claires, mieux organisées et donc plus positives. J’aime bien Rousseau et ses rêveries du promeneur solitaire… Et pas question pour moi que nos Big brothers capitalistes me fasse renoncer à m’opposer à eux…

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