Depuis le 4 avril 2020, il est autorisé d’électrifier un véhicule thermique d’occasion pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre et de polluants. Cette solution évite de refabriquer un nouveau véhicule et de recycler l’ancien. L’énergie électrique utilisée, si elle provient de sources non carbonnées, peut rendre d’anciens véhicules quasiment vertueux sur de longues années. Ce système n’est cependant pas parfait car il embarque des métaux rares dans son moteur, dans ses batteries et bornes de charge. Reste que de nombreuses personnes, obligées d’utiliser une voiture, en milieu rural par exemple, peuvent être séduites par ce procédé qui permet de faire évoluer son véhicule à un prix raisonnable si l’on bénéficie des aides de l’état. Je vous propose de faire le tour des questions techniques, économiques et écologiques pour tenter d’y voir plus clair.
Alan Mabden / Pigrai.com

Le rétrofit / késako?
Pour transformer une voiture thermique en électrique, il convient de déposer le moteur thermique, le radiateur, l’alternateur, la batterie, les fluides, le réservoir et l’échappement. On évitera ainsi par exemple le coût élevé d’un nouveau pot catalytique à l’avenir. Le système de freinage, la boîte de vitesses, eux, restent en place. On remplace ensuite les éléments ôtés par une motorisation 100 % électrique composée de batteries, du moteur électrique et de composants électriques.
Pour bénéficier de cette transformation nommée rétrofit, il est impératif que la voiture concernée dispose d’un contrôle technique favorable, d’une configuration d’origine en bon état, être immatriculée en France et âgée de plus de 5 ans.
Les durées de garantie peuvent différer en fonction du type de batterie installée. Les retrofiteurs s’engagent sur des garanties qui vont de 3 ans à 7 ans, avec des limites complémentaires en kilomètres ou en nombre de cycles de recharge pour certains. Enfin, des périmètres différents de garantie seront également mis en œuvre du type, 2 ans pour les éléments hors batterie et garantie décennale pour les batteries.
On peut installer un kit rétrofit électrique sur une auto ou sur un deux-roues (Mobylette, moto). Théoriquement, il n’y a aucune limite au champ d’application du rétrofit. Il faut cependant que le système d’électrification ait fait l’objet d’une homologation.
Kit rétrofit homologué : transformer son véhicule en voiture électrique
Quand un kit rétrofit homologué existe (L’homologation de bien d’autres kits rétrofit voiture est en cours), les consommateurs ont l’assurance qu’il est compatible avec leur véhicule. De plus, le changement des caractéristiques sur la carte grise est facilité. Il ne faut pas se rendre à la DREAL ou à la DRIEE pour faire une réception à titre isolé. Pour faire sa carte grise rétrofit, Il suffit de fournir dans son dossier de demande de modification des caractéristiques techniques les documents fournis par l’installateur habilité.
Une fois transformé le véhicule recevra un certificat d’homologation, une nouvelle carte grise électrique ainsi que la vignette Crit’Air 0.
On peut rétrofiter une voiture urbaine type Fiat 500, Twingo 2 ou Kangoo à partir de 500O euros, à condition de pouvoir déduire les aides les plus favorables. Le véritable prix oscille autour de 8 à 10.000 €. Attention! les kits rétrofit les moins chers offrent le plus souvent une autonomie limitée à une centaine de kilomètres. Il s’agit donc d’une option qui s’adresse principalement aux citadins qui effectuent de petits trajets

Pour des petits modèles urbains (Twingo, Peugeot 107, Citroën C1, Toyota Aygo…, la nouvelle motorisation électrique greffée vous permettra en moyenne 100 à 200 kilomètres d’autonomie et pour une vitesse maximale de 110 km/h. Cela peut paraître limitant mais dans des villes limitées à 30 km/h, des routes de campagnes limitées entre 70 à 90 km/h et si l’on emprunte des petits bouts de quatre voies, cela fonctionne parfaitement pour aller et revenir du travail, faire ses courses, emmener les enfants au sport ou pour aller vers la forêt la plus proche. Pour les plus longues distances (vacances et week-end), le TER, le TGV, le car ou le covoiturage sont des solutions plus adaptées (de mon point de vue) que d’acheter une très grand et lourd véhicule pour cette fonction très occassionnelle.
Une solution intéressante / Le rétrofit en location
Le rétrofit, Ecologique?
Le « rétrofitage » est plus intéressant écologiquement que la mise au rebut d’un véhicule d’occasion et l’achat d’un véhicule neuf. Lorsqu’on achète une voiture neuve, elle a déjà émis 50 % du CO² de sa vie, rien que par sa fabrication. En faisant de l’économie circulaire et en réemployant ce qui existe déjà, on amortit plus longtemps le CO² qui a été émis pendant la fabrication.

C’est aussi une formule intéressante pour ne plus émettre de gaz à effet de serre à l’utilisation dans les prochaines années. Le bilan carbone d’un Français est d’environ 12 tonnes de CO² par an et la mobilité individuelle représente environ un douzième de ces émissions.
Quand une petite voiture (Fiat 500, Twingo, Polo, Kia, etc…) fait 10 000 km, cela correspond à 1 tonne de CO². Convertir une petite voiture thermique en électrique permet donc de sacrées économies en terme d’émissions.
Le rétrofit et la criticité du cuivre / L’alternative du recyclage
Rétrofiter un véhicule thermique en électrique n’a pas que des avantages. Cela nécessite d’installer un moteur, certes moins lourd et emcombrant, mais contenant beaucoup de cuivre et d’utiliser des bornes de recharge utilisant aussi ce matériau rare.
Cohérant avec le principe « écologique » et circulaire du rétrofit, l’utilisation de métaux recyclés est la solution à privilégier pour l’avenir en attendant de nouveaux matériaux moins problématiques. J’espère que nous irons vers des labels d’utilisation de métaux recyclés dans les mois et années à venir.
Cette solution alternative consiste donc à miser sur le recyclage de cette ressource de plus en plus rare et surtout très polluante à l’extraction et la transformation. Le cuivre a la propriété d’être recyclable à l’infini sans perte de performance ni de propriétés.
Le cuivre recyclé répond actuellement à 33 % de la demande mondiale, avec environ 9,7 millions de tonnes en 2018. Il est fort probable que les pays industrialisés développent le recyclage du minerai de cuivre, afin d’être moins dépendant des importations. La Chine a opté pour des incitations fiscales, comme une baisse de la TVA, pour les entreprises utilisant du cuivre recyclé. A terme, l’amélioration des technologies de recyclage, les politiques publiques mises en place pour inciter à l’économie circulaire et la forte demande en cuivre devraient permettre de structurer le marché du recyclage.
Le rétrofit des bornes de recharge
Autolib’, réseau de voitures électriques en libre-service installé en région parisienne en 2011 et démantelé en 2018 a laissé derrière lui quelques milliers de bornes de recharge. Plutôt que de désinstaller ces bornes en engageant des travaux de voirie, les opérateurs ont mis en place une solution à la fois économique et durable pour les moderniser : le rétrofit des bornes. On garde ainsi les câbles souterrains jusqu’à la structure de la borne elle-même, seuls l’électronique interne et les prises sont remplacés. Une fois la remise aux normes, l’ancienne borne devient une borne accessible au public, compatible avec toutes les voitures électriques ou hybrides rechargeables du marché). Ce genre de remise à niveau peut aussi concerner des travaux d’adaptation moins poussés, pou simplement changer le type de prise d’une ancienne borne publique.
Sur la vingtaine de communes d’Ile de France ayant opté pour cette solution technique, pas moins de 250 bornes Autolib’ ont déjà été transformées de cette façon. Le kit de conversion mis au point par les services techniques d’IZIVIA concernera un demi-millier de bornes réparties en région parisienne mais aussi les bornes de recharge Bluely à Lyon et Bluecub à Arcachon. Remises aux normes, ces bornes s’intègrent dans le réseau national de points de charge accessibles pour tous les véhicules électriques et cela évite d’en fabriquer de nouvelles avec les conséquences écologiques qui vont avec.
Un véhicule avec batteries ou un diesel?
Un véhicule refité est un véhicule électrique, donc avec batteries qui, comme on le sait, ne sont pas vertueuses. Mais continuer à rouler avec un vieux diesel n’est pas non plus une solution d’avenir pour des raisons économiques et écologiques. Que faire alors?
J’avoue que c’est compliqué de faire un choix de véhicule pour ceux qui n’ont pas… le choix alternatif possible. La problématique existe particulièrement pour les personnes qui habitent à l’extérieur des villes où, pour le moment, les transports en commun et le covoiturage dynamique ne sont pas adaptés aux besoins de circulation des gens en milieu rural. Quand on vit, comme moi, dans une ville comme Rennes et une région comme la Bretagne, qui mettent des moyens considérables dans les transports en commun, l’auto-partage et les REV (Route express velo), il est plus facile de se passer de voiture. J’ai fait ce choix à la fois écologique et très économique.
Conclusion
Cette alternative du rétrofit électrique me semble intéressante (si véhicules en bon état et solidement construits) pour les personnes vivant en milieu rural isolé ou pour des catégories professionnelles comme les artisans, les services à la personne, les soins médicaux… qui utilisent actuellement de vieux diesel. Je pense même que les aides à la conversion devraient être limitées à ces personnes afin d’éviter de s’engouffrer dans un parc monstrueux de véhicules électriques et ses conséquences… écologiques. La nouvelle loi européenne sur les ombrières et toits solaires devrait permettre dans ces territoires de recharger facilement et sans émission de gaz à effet de serre une auto ou une camionnette. Un moteur électrique a une durée de vie qui peut être très longue. Reste à résoudre la problématique des batteries (recherche très active à ce sujet) et du remplacement du cuivre et autres métaux par d’autres matériaux à court et moyen terme. Dans l’immédiat, il est souhaitable que le processus d’économie circulaire du rétrofit soit respecté par les professionnels agréés en utilisant des kits réalisés avec du cuivre et des métaux recyclés.
Il n’y a pas de solution parfaite en terme de déplacements et il n’est pas possible pour tous de se passer de véhicule. Les transports en commun, l’auto-partage et le co-voiturage dynamique seront des pistes à privilégier en milieu rural pour diminuer la production de voitures et ses conséquences sur l’avenir.
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