« Parce que nous refusons de rêver notre vie. Parce que nous voulons vivre notre rêve » : voilà ce qu’écrit Patrick, qui a fait le choix de vivre sur un voilier avec sa femme, Marie-Claire.
Vivre sur un voilier c’est avant tout vivre

Vivre à bord d’un voilier est un mode de vie qui n’est pas adapté à tout le monde : c’est un mode de vie diamétralement opposé à une vie dans une maison sur terre ferme. Ils voulaient donc savoir s’ils en étaient capables avant de se lancer pour de bon.
Ils ont amarré leur bateau à Bruxelles où ils se rendent très vite compte qu’ils sont loin d’être les seuls. D’autres ont fait le choix de ce mode de vie alternatif. Vivre sur un voilier est finalement courant, et présente de nombreux avantages : une fois le voilier acheté, le coût mensuel des charges ne représente quasiment rien.

Le bilan de Patrick et Marie-Claire est plus que positif. Ils font maintenant partie d’une vraie communauté qui s’entraide et qui se soutient. Le port est devenu comme un petit village où tout le monde se connait. Le soir souvent ils se retrouvent tous ensemble autour d’un verre. Patrick constate qu’il y a toutes les tranches d’âges et toutes les origines sociales.
Quand ils partent en vadrouille, ils ont le plaisir d’avoir une maison qui ne leur coûte quasiment rien. Quand ils rentrent à Bruxelles ils peuvent s’amarrer directement dans le centre ville. Ils payent une petite cotisation chaque année, mais peuvent utiliser gratuitement le réseau wifi. Ils ont également au port un petit garage où ils entreposent leur outillage, et quelques affaires à la valeur sentimentale trop importante pour être donnée.
La liberté qu’ils ont gagnée c’est celle de ne pas être prisonniers d’un système où la réussite se voit dans une grande maison et une belle voiture. Malgré une vie simple, ils sont enfin heureux. Ils espèrent « donner envie à d’autre, à montrer que ce que nous avons décidé de vivre, d’autres peuvent aussi le faire ».
Livre / Le Grand Départ et la vie sur l’eau / Michka

« Le Grand Départ et la vie sur l’eau », paru en 1977 a fait rêver toute une génération de candidats au voyage. Ce livre reste une référence sur l’utopie réalisable et reste d’une criante actualité sur notre rapport au monde qui nous entoure et à notre destinée

Michka était (à l’époque et je présume toujours, sauf pour l’âge 🙂 une jeune femme de tempérament qui avait fait le choix de construire son voilier et de partir vivre sur les mers quelques années avec son compagnon. Dans son livre, on trouve des choses comme : « En mer, on ne dépend que de soi-même. Les complications inutiles semblent décantées. Pour peu qu’on ait construit son bateau, on a vraiment sa destinée entre les mains ; il en résulte une impression extrême de puissance et de liberté. « C’est par ce contact retrouvé avec le réel et la nature qu’il nous pousse des racines, que nous percevons de nouveau notre modeste place dans l’univers, et que nous recommençons d’appartenir au monde qui nous entoure « . Ou encore :
« La santé est un état de bien-être physique, mental et social ». Ou bien encore : « Cesser de consommer, se tourner vers d’autres valeurs, vers un mode de vie qui ne soit pas fondé sur l’acquisition et le renouvellement des biens matériels… ». Etayés tout au long des pages d’études et de chiffres d’époque (mais aussi d’illustrations à la main), les thèmes abordés et le contenu restent malgré tout d’une criante actualité.
Le livre de Michka est cependant loin d’être une rêverie éthérée de soixante-huitard en mal d’utopie anti-consumériste. C’est bel et bien un guide pratique de vie à bord, avec une philosophie de vie tout à fait contagieuse. Ce qui est magique avec Michka, c’est cette fluidité de l’écriture, tour à tour poétique ou réaliste, qui vous emporte au fil du voyage, et où les astuces de vie quotidienne (dûment éprouvées !) sont ponctuées de grisants récits-souvenirs de moments passés en mer.
« Le Grand départ, celui dont tout le monde rêve pour se donner bonne conscience, ou bien celui qu’on décide de vivre, n’est pas plus une utopie qu’une expérience marginale.
La vie sur l’eau, celle qui donne des frissons aux cap-horniers des villes, ou bien celle qu’il est si doux de mener, n’est pas pleine de dangers ni réservée aux sportifs.
Le Grand départ et la vie sur l’eau, c’est, cela peut-être, simplement une histoire.
Michka, une parisienne quelque part au sud de l’Angleterre, devant un vieux quillard endormi dans un lit de limon. Cette histoire commence ainsi, il y a dix ans*, et à travers ce premier bateau (tout petit en vérité) Michka regardait déjà l’infinie succession des horizons : loin, loin des villes, pour une autre vie, à la découverte de la mer, des canaux, et d’une existence enfin différente.
Traverser
la Manche, suivre les côtes, s’amarrer dans la campagne, s’aventurer
dans le golfe du Lion, trouver l’Espagne, les Baléares, prendre son
temps, prendre son temps, prendre son temps…
Un jour, Mag Mell
est devenu trop limité. La Méditerranée aussi. Le bateau vendu,
l’Europe quittée. Alors qu’elle cherche un poste de professeur de
préférence en montagne au Canada, le hasard administratif (appelez-le le
destin si vous préférez) la ramène aux pieds du plus grand des océans :
la Pacifique. Mais de la montagne, elle trouve quand même le froid,
puisque Prince Ruppert est à 70 kilomètres de l’Alaska.
Et pourquoi ne pas commencer tout de suite plutôt que d’économiser passivement ? Construire son bateau, c’est aussi se constuire. Quinze mois plus tard, Nomad est mis à l’eau, inachevé ; mais c’est déjà un bateau, c’est déjà une maison. Six mois après, sans mât, cette coque de ferro-ciment appareille, ou plutôt, naît à la mer. Être parti, voilà l’important.
Ainsi, Michka mêle sa vie à celle de Nomad,
né sous ses mains, qui la porte entre les îles du golfe de Georgia, la
Californie, le Mexique, l’Amérique centrale, Panama. Les jours
s’écoulent dans la pulsation de l’étrave, les escales deviennent des
amis chers, les ports des rencontres multicolores. Depuis bien des
milles maintenant, Nomad est grand, il a un fort mât, il lui
tarde de sauter vers d’autres océans. La Colombie, et la Jamaïque encore
épargnée par « l’antillomanie », le poussent vers la traversée de
l’Atlantique par les Bermudes et les Açores. Pas d’exploit, pas de
démâtage, mais le plaisir renouvelé de la mer qui s’offre, des terres
éphémères.
Dans la vie, les meilleures choses sont données.
Ce livre, au sens le moins directif de l’expression, est un manuel de savoir vivre, une impulsion, l’étincelle qui mettra le feu à vos poudres. En lui se mêlent théories et pratiques, prises dans la spirale des souvenirs. Il raconte comment faire du pain, se chauffer aux pôles, prévoir son naufrage, fumer du poisson, être à soi-même son propre médecin, effrayer les requins, partir sur un bateau minuscule, confectionner du savon à partir de noix de coco, conserver un an du fromage, prendre le grand départ quand on a 70 ans, se baigner dans trois litres d’eau, mais il dit aussi comment trouver sa liberté par la simplicité, emmener avec soi ses enfants, ses animaux, être « cool » sans couler, échapper au système qui nous enracine pour mieux nous faner, vivre pauvre avec classe, ou bien encore comment enrayer à son propre niveau le cercle vicieux de la pollution qui tue.
Ce livre ne s’adresse pas seulement à ceux qui larguent les amarres, mais aussi à ceux qui restent. Il leur demande également pourquoi, et il leur montre comment leur progrès et leurs édifices ressemblent à des cimetières. Ce livre a les yeux grand ouverts. Et il vous regarde.